Un reptile par habitant est autant une fable morale et politique qu'un roman policier. On y découvre comment un jeune professeur de lycée aussi naïf que coureur de jupons se retrouve impliqué indirectement dans le meurtre du chef-adjoint d’état-major d’un pays africain qui pourrait bien être le Togo, si l’on en croit les références à une ancienne puissance coloniale allemande.
Narcisse, déjà très pris par ses conquêtes se serait bien dispensé de devoir prêter main forte au sous-préfet pour enterrer nuitamment le corps du brillant officier sorti de Saint-Cyr, bras droit du Président (Père de la nation élu à vie), assassiné chez sa maîtresse. Mais la disparition de Katouka va avoir des conséquences politiques que personne n’aurait pu imaginer : arrestations, manifestations de soutien au Président-fondateur et quelques cadavres. Mais n’est-il pas plus facile d’accuser un haut-gradé disparu de sédition et d’emprisonner ses soi-disant complices que de faire la lumière sur sa disparition soudaine ?
Tu sais, la trahison des siens est le crime le plus horrible qui soit. Elle est sévèrement punie par toutes les sociétés sensées, sauf chez nous en Afrique.
Ce court roman de Théo Ananissoh (né en 1962), histoire d’un vrai-faux coup d’Etat, apporte une vision aussi absurde que désespérante sur la situation des pays africains et sur les pratiques de ceux qui les gouvernent. Sans tenir vraiment en haleine, l’intrigue est solide, l’écriture sobre mais efficace, l’humour toujours présent et certains personnages, dont un collègue de Narcisse, sorte de chevalier vengeur aux motivations mystérieuses et aux principes moraux étranges, sont assez savoureux.
Théo Ananissoh, Un reptile par habitant © Paris, Gallimard, coll. Continents noirs, 2007.